Pourquoi le nom « Maison Nicodème »

Qui est Nicodème ?

Au fond de la cathédrale de Saint-Omer est exposé un magnifique tableau de Rubens. Nicodème est l’un des personnages du tableau.
L’Évangile écrit par saint Jean fait référence à ce passage (Jn 19, 38-42). Le tableau est très sombre, et la seule lumière provient de Jésus mort. Nicodème est assis sur l’échelle. On le reconnaît grâce à son turban de pharisien. C’est un notable.
Rubens a voulu exprimer le passage qu’a vécu Nicodème. Il est passé des ténèbres à la lumière, de la nuit au jour.

Il faut en effet comprendre le chemin qu’a fait cet homme.
Au début (Jn 3, 1-21), c’est un pharisien, c’est-à-dire un homme religieux très inflexible : « La loi c’est la loi ! » Seule la Loi de Moïse compte ! En faisant la rencontre de Jésus, il va comprendre que la vraie Loi, c’est l’amour. Que l’on n’atteint pas Dieu par la Loi, à force de bonnes actions… Mais que l’on est aimé par Dieu, et qu’il nous permet de répondre à son amour en nous donnant les commandements auxquels chacun est libre d’obéir. Nicodème est venu de nuit, sans doute parce qu’il ne veut pas que cela se sache. Mais la nuit ici a aussi une valeur symbolique. C’est son cœur, son esprit, sa vie qui sont encore dans la nuit. Toutes ses connaissances et toutes ses richesses (c’est un notable) ne donnent pas le sens de sa vie.

C’est la rencontre avec Jésus qui va tout chambouler. Il va renaître ! Mais cette fois, il va naître par l’Esprit. Il va comprendre le sens de l’existence. Pour vivre heureux et découvrir le vrai Dieu, il faut se laisser bousculer par l’Esprit d’amour qui oblige à donner sa vie pour ceux qu’on aime. Donner sa vie même pour ses ennemis. Nicodème l’a compris.

Membre du Sanhédrin, c’est-à-dire du conseil des 70 responsables de la communauté juive, il dénonce l’injustice du procès fait à Jésus (Jn 7, 40-53). Alors que le tribunal condamne Jésus à la peine capitale, Nicodème ose prendre la parole. Il risque d’être exclu de la communauté juive et de perdre son statut. Il prend le risque. Il était dans la peur, il est devenu courageux. Plus tard encore, Nicodème ose demander l’autorisation de décrocher le corps de Jésus. Cette fois il a totalement basculé.
Il est devenu le disciple du Christ. Sur le tableau de Rubens, Nicodème est habillé d’un vêtement blanc, le vêtement du baptême, sans doute pour signifier qu’il a vécu la renaissance dans l’Esprit dont il avait débattu avec Jésus (Jn 3, 5).
Par le jeu des couleurs, ici le blanc, on comprend que Nicodème ne fait qu’un avec Jésus. Il est devenu son disciple. Le tableau est très sombre, mais Nicodème est déjà dans la lumière du « grain de blé qui tombe en terre pour porter du fruit » (Jn 12, 24). Le véritable Maître s’est abaissé pour que le disciple soit élevé. Nicodème tente de retenir le corps de Jésus afin qu’il ne tombe pas alors qu’on le décroche de la croix.
Mais ne serait-ce pas plutôt le Christ qui devient le siège, le trône céleste sur lequel le disciple est maintenant assis ?

Pourquoi « Maison Nicodème »

Nous voulons que ce lieu soit la maison de tous.
Le mot « maison » sous-entend de l’accueil, de la chaleur, de la convivialité, de la fraternité. Nous formons une même famille. La maison est un lieu de partage (repas, discussions, rencontres…), de repos (jeux, jardin, hébergements,…), d’étude (bureau, bibliothèque, conférences, expositions,…), de méditation (oratoire, temps de prière et de célébration…). En fait, cette maison devient la maison de toutes celles et de tous ceux qui désirent être accompagnés pour passer de la nuit au jour !

C’est-à-dire passer de convictions trop bien établies à la capacité de cheminer en osant chercher la vérité sur les choses, les gens, sur Dieu et sur soi-même, en comprenant que cette quête n’est jamais finie. Qu’elle n’est possible que dans la rencontre des autres, et en particulier des pauvres, car les plus humbles savent mieux que quiconque que rien n’est jamais acquis. Jésus ose dire : « Je suis le chemin, la vérité et la vie ». La Maison Nicodème veut permettre à chacun de faire un bout de chemin pour découvrir la vérité de Jésus. Dans le texte de la rencontre avec Nicodème, le mot « vérité » est écrit 7 fois (Amen : autre façon de signifier « en vérité »). Il y a donc une grande insistance sur l’importance d’être en vérité… Comme Nicodème, passer dans la lumière de la vérité. Dans la première rencontre entre Jésus et Nicodème, il y a cette phrase : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils. »

Le début de cette phrase « Dieu a tant aimé le monde » devient notre devise, un appel à aimer le monde et non pas à juger le monde. Jésus meurt en croix. Il est élevé sur un bois qui rappelle le serpent de bronze que Moïse avait élevé pour guérir les personnes mordues par les serpents. En regardant ce serpent de bronze, les personnes étaient guéries. Pour les chrétiens, c’est le Christ exposé sur le bois de la croix qui guérit de toutes les morsures du péché (vol, trahison, mensonge,…). En descendant dans la mort, il prend sur lui tous les péchés qui conduisent à la mort, et ainsi il élève les âmes vers le ciel. Ainsi, elles renaissent… Jésus parle de l’Esprit. C’est lui qui inspire et fait vivre. L’Esprit de Dieu est comme le vent : il est invisible mais il est perceptible. Certaines choses qui existent ne se voient pas. Il s’agit donc de croire sans voir.

En résumé

La Maison Nicodème est donc un lieu d’accueil et de fraternité, un lieu où, pauvres mais ensemble, chacun fait l’expérience d’une renaissance, d’un passage, d’une transformation intérieure. La maison est un lieu de rencontre où l’on apprend à accueillir l’Esprit qui souffle et qui envoie où il veut ! Comme Nicodème ayant rencontré le Christ qui donne sa vie, nous voulons partir vers le monde pour l’aimer et le servir !